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Chroniques du deuxième règne de Manuléon 1er

Chronique du 6e jour du mois de mars, en l’an de très très grande décrépitude vingt-trois

Où il est question des effets miracle d’une certaine poudre et d’une charité bien ordonnée

Le Roy entendait instaurer de nouvelles relations avec les royaumes vassaux de l’Afrique. Il fit mander son aéroplane et s’en alla excursionner dans les dits royaumes. Notre Condescendant Despote, pratiquant derechef sa chère doctrine de l’Enmêmetantisme – qui lui avait tant réussi- annonça que la Startupenéchionne laisserait désormais ses Etats inféodés régler leurs affaires seuls – ce qu’ils ne savaient tout bonnement point faire – puis il distribua ici et là quelques menues caresses, quelques vagues promesses, et moult ordres, le tout dans une logorrhée profuse, où les injonctions l’emportaient sur les cajoleries. Puis Sa Tressautante Frivolité s’empressa d’aller se divertir en compagnie de quelques beaux éphèbes dans les gargotes de la capitale du royaume du Congo. On s’amusa beaucoup. Notre Poudreux Bibelot avait été fort marri de ce qu’une impudente gazetière eût osé le mettre à la question sur la Grande Grève qui s’annonçait. Il avait certes balayé cette importune d’un revers de ses mains manucurées et n’avait point commenté ce qui était une formalité. Le peuple se soumettrait. Il le fallait. Les nobles maisons Blaqueroque et Maiquinesait l’exigeaient et il était leur obligé.

En Startupenéchionne, les Chambellans se mettaient en quatre, que dis-je, en mille pour faire accroire aux braves gens que les gueux aux ordres des Guildes, allaient ravager le pays tels un nuage de sauterelles. Le Chevalier d’Alanver – que l’on appelait désormais Nostraveranus, en souvenir d’un mage des temps anciens qui avait prédit l’apocalypse – avait fait des émules. Le petit duc de l’Attelle, qui n’avait jamais dérogé, se mit en demeure de défendre les laborieux. « Ceux qui trinquent sont ceux qui triment » énonça-t- il fort pompeusement, fournissant ainsi au peuple une devise des plus opportunes à brandir sur un placard. Le duc des Hospices, Chambellan aux Transports, prédit que la Seyne charrierait du sang, celui de ceux et celles qui seraient contraints de marcher pour se rendre au labeur. Il était entendu par tous que la vile populace qui battrait le pavé ne serait constituée de que fainéants et fainéantes.

L’ingénue duchesse de la Gerbée vint jurer la main sur le cœur que le gouvernement n’avait, au grand jamais, menti sur le nombre de pensionnés qui verraient leur maigre subside augmenter d’une pièce ou deux. La palme revint au duc du Seau d’Aisance qui s’afficha en grande gloire sur la première page de la gazette du grand ami du Roy, le comte des Arrhes-Naud. « C’est une réforme de sénestre » avait claironné ce brave d’entre les braves serviteurs de Notre Fieffé Bonimenteur. Au même moment, à la Chambre Haute, un des Sénateurs de la Faction des Raipoublicains, le vicomte de la Retaille, se félicitait de ce que la Dextre avait infléchi dans le bon sens cette réforme « mal taillée ». Les sénateurs l’avaient mise d’aplomb, c’était désormais une « réforme de dextre ». On avait fait voter la fin des privilèges pour les clercs de notaire et d’autres encore, mais on s’était bien gardé de retoquer le généreux système qui accordait une belle pension aux sénateurs et aux députés.

On était bel et bien au Royaume du Grand Cul par-dessus Tête.

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