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Brève chronique du sixième jour de janvier, en l’an de disgrâce 21

Brève chronique du sixième jour de janvier, en l’an de disgrâce 21

Où il est question d’écus fort bien placés, d’esbroufe improvisée et de larmes bien rémunérées.

Le Roy, fort marri de ce que la Croisade de la Sainte-Vaccine eût connu des prémices aussi calamiteux – ce qui faisait se gausser nos voisins- avait convoqué les gazetiers de la Gazette du Dimanche, qui lui étaient tout dévoués, et ce d’autant plus que Notre Généreux Mécène venait d’accorder au baron de la Garde D’Enlair -lequel possédait quelques maisons d’éditions et quelques gazettes dont la Gazette du Dimanche – un prêt fort conséquent de plus de quatre cent soixante cinq millions d’écus. La Cassette de la Starteupenéchionne s’engageait même à rembourser la quasi-totalité de cet emprunt si d’aventure le baron se retrouvait acculé à la soupe populaire. Jamais le dicton « on ne prête qu’aux riches » ne s’était autant illustré que sous le règne de Sa Divine Prolixité.

La Gazette du Dimanche relata donc ce qu’on lui demandait de relater : Notre Poudreux Cabotineur était en colère et exigeait que l’on accélérât sur le champ la Croisade – laquelle ne devait point être « une promenade de famille » -, tout en oubliant fort à propos que c’était conformément à ses ordres que l’on avait commencé de procéder « avec lenteur et méthode », ce que le fort servile petit duc de l’Attelle appelait aussi « une voie différente ». Le Chevalier Gode-Froid-Bouillant d’Alanver, qui s’entendait tout autant que son Suzerain à manier l’esbroufe et dont on connaissait les talents d’escamoteur, lança aussitôt les nouveaux cris de guerre : « accélérer, amplifier, simplifier ». On allait voir ce qu’on allait voir.

Le comte de la Poissonnerie, chef des Croisés – qui s’était vanté dans le salon d’une Lucarne Magique de n’être point un organisateur, comme si cela était une marque de la plus haute distinction – , se vit adjoindre une duchesse pour accomplir cette vile besogne. Madame du Coquetèle, tel était le nom de cette guerrière, était réputée s’entendre en approvisionnement en tout genre. Des gazetiers fort impertinents firent le compte de tous ceux que l’on avait engagés dans la Croisade. La liste donnait tout simplement le tournis. On apprit ainsi que le Roy avait fait appel dès le mois de décembre à une officine des Amériques, la maison MacMiche, laquelle était représentée dans notre pays par le vicomte de la Calanche, un Armoricain, ancien fidèle du vieux baron de la Juppe. Le royaume de Germanie avait mis son armée de métier au service de la Croisade et l’on vaccinait sans coup férir. Dans notre pays, Sa Jacasseuse Ostentation avait imaginé « l’armée startupenéchionnesque » à laquelle on allait adjoindre, ô géniale trouvaille, une compagnie de trente cinq Riens et Riennes tirés au sort. On leur confierait l’impossible mission de surveiller les avancées de la Croisade. La comédie du printemps allait pouvoir se rejouer. On avait simplement troqué les masques et les écouvillons contre de très sensibles et fragiles petites fioles de sérum qu’on allait agiter en tout sens pour éloigner les miasmes, tout en menaçant la populace d’un nouveau Grand Confinement si la Croisade ne parvenait à être victorieuse.

Pendant ce temps, la marquise de la Buse avait filé avec armes et bagages dans le Royaume de l’Helvétie où Notre Turpide Jouvenceau lui avait trouvé une charge tout à fait indiquée : elle seconderait le chef de l’Ohémesse, cette grande officine en charge de la MalPortance de tous les habitants de la planète. Le prix des larmes ravalées était fort exorbitant. Les émoluments de la marquise seraient conséquents et sa charge lui assurerait l’immunité diplomatique. Le déshonneur était sauf. Toutes celles et ceux qui en Starteupenéchionne entendaient que la vérité se fît jour sur les agissements de la marquise au moment où les miasmes étaient entrés dans notre pays en seraient pour leurs frais. Se laver les mains, en toutes choses, en tout lieux, telle était la maxime de Sa Neigeuse Manigance et de Sa Cour.

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