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Chroniques du règne de Manu 1er dit l’Ecrabouilleur de Gilets.

Chronique du 18 mars

Notre Neigeux Monarc était fort courroucé. Non pas parce que ces furieux d’Engiletés avaient encore battu le pavé – la maréchaussée avait reçu des ordres pour laisser agir des trublions patentés, vêtus de noir, qui s’y entendaient à merveille pour tout casser, ils étaient d’ailleurs connus sous ce vocable de « casseurs , ce afin de discréditer ces gueux d’Engiletés – mais parce qu’il Lui avait fallu écourter un si délicieux moment sur les cimes des Pyrénées ! Sur les Champs Elysées, non loin du Château, la gargote préférée des Très-Riches-Amis avait pris feu ! On accusa bien entendu les Engiletés, puis les trublions, ou vice-versa. L’important était de jeter l’opprobre sur cette révolte jaune qui n’avait que trop duré. Il s’avéra que c’était en réalité les argousins qui avaient tiré force coups d’arquebuse, lesquels avaient enflammé la galerie de l’estaminet. On grossit considérablement les dégâts, les gazetiers étaient passés maîtres dans l’art de l’emphase. Sa Jupitérienne Petitesse tonna : voilà que les séditieux voulaient détruire la StartupNéchionne qui s’incarnait de façon si éclatante dans ce modeste établissement, où un simple petit déjeuner coûtait un dixième de ce que gagnait péniblement une Rienne femme de ménage. On allait interdire aux Engiletés tout accès à la capitale ! On les embastillerait ! On venait d’ailleurs de prendre langue avec un artisan, le sieur Bouh-Igues, pour que soit érigée le plus rapidement possible une nouvelle Bastille. Une banque américaine – à qui le parti de Notre Grand Dilapideur venait de vendre les aéroports de la capitale – se proposa illico pour avancer les fonds et gérer le futur établissement. On y ferait travailler pour rien tous ces fainéants et ces illettrées.

Le Premier Grand Chambellan fut sommé par Sa Sirupeuse Malveillance de faire tomber des têtes. Ce fut celle du Grand Argousin en chef de la place de Paris qui s’abattit en premier. Ce téméraire avait eu le malheur de demander qu’on usât un peu moins des arquebuses lanceuses de balles de « défense » – de celles qui vous emportaient la moitié de la figure, crevaient des yeux et arrachaient des mains et des pieds, vous condamnant pour le restant de votre vie à être une gueule cassée, à l’instar des Poilus de la Grande Guerre – et aussi, l’impudent, de contredire, l’été précédent, les fables et les menteries du Château au sujet du sieur de GrosBras. La vengeance se mangeait en aspic, à la table de Notre Impitoyable Jouveneau. On nomma pour lui succéder le Grand Argousin qui avait autorisé – et applaudi- que des roussins aient lourdement caressé l’échine d’un député des Insoumis. « Prime au violent » cuicuita Gracchus Mélenchonus sur les réseaux sociaux.

Glissons ici un mot sur le sieur de GrosBras. Nous l’avions laissé dans une geôle tout confort. Il n’y avait pas fait long feu. Avec son comparse le sieur de Cras – avec qui il put longuement converser au palais de Justice afin de bien accorder leurs violons et leurs mensonges – il fut libéré en grande pompe. Une gazette publia de tendres estampes où on le voyait promener un bambin dans une poussette. C’était pour faire oublier que, sitôt libre de ses chaînes, le sieur de GrosBras s’en était allé ventre à terre dans la riante Helvétie, continuer ses juteuses affaires. Il se disait que la gazette de ce fouineur de Plénus Moustachus préparait une enquête des plus documentées sur le lien que continuait d’entretenir ce célèbre barbouze avec son Doux et et Bien-Aimé Suzerain.

Aux Ides de mars ainsi que le jour qui suivit, la jeunesse du pays avait battu le pavé pour sommer les puissants de s’intéresser au climat. Au rythme où allaient les choses, on allait bouillir sur la planète d’ici quelques décennies. « Pour un avenir vert, on brûle un ministère » put-on lire sur certains placards brandis à bout de bras. A l’autre bout du monde, un Haineux, convaincu de la thèse aussi stupide que dangereuse du « grand remplacement », thèse si chère aux partisans de la Marquise de Montretout – laquelle, en fieffée hypocrite qu’elle était, faisait mine de ne pas savoir de quoi il en retournait- ouvrit le feu sur de braves gens qui n’avaient que le tort à ses yeux d’être des mahométans. Dans notre triste pays, là où jadis s’écrivit la Déclaration des Droits de l’Homme, trop peu hélas s’émurent de ce massacre. Les idées nauséabondes avaient colonisé les esprits débilités par l’influence de monsieur d’Anounat et d’autres bateleurs de foire.

Le lundi suivant cet acte XVIII de la Grande Gileterie – qui vit encore bon nombre de mutilés – Notre Délicat Roitelet convia une foule de beaux esprits à venir converser à bâtons rompus au Château, tout ceci sous l’égide de la Gazette de la Culture, laquelle n’en finissait pas de professer la plus grande complaisance envers Sa Verbeuse Sentence. On put entendre d’aucuns de ces clercs prendre la parole avec déférence, qui pour encenser Notre Divin Spirite, qui pour flétrir ces gueux d’Engiletés. Ainsi ce monsieur de Quigne-gnard, un obscur scribouillard, qui vivait là enfin son heure de gloire et qui sut, en mots choisis, déverser sa haine du peuple.

A quelques lieues de là, le Premier Grand Chambellan déroulait la doctrine qui allait être appliquée aux Engiletés : on allait tout bonnement les éradiquer, les écraser, les écrabouiller. Il n’en resterait que quelques uns qui demanderaient vite grâce. Quelques heures plus tôt, sur une gazette parlée, une petite duchesse toute fraîche émoulue pompière du régime, madame de La Poire, par ailleurs commise auprès du Grand Jardinier, actionna sa lance : elle courut sus à ceux qui critiquaient le séjour pyrénéen de Notre Petit Skieur. Ce n’était tout de même pas à lui d’aller courir derrière chaque casseur ! C’était là des actes de sauvagerie et de barbarie. Elle avait bien appris sa leçon et répétait les mêmes mots que Sa Sanglante Répression : on voulait détruire la StartupNéchionne ! « Nous allons continuer de revoir notre doctrine, martela cette zélée courtisane, il faut continuer de s’adapter à ce niveau de sauvagerie ».

Il n’était pas jusqu’à une ancienne Engiletée, dame Geaqueline, qui ne se lança dans le maniement de la pompe à eau. Elle vilipenda ses anciens comparses, les traitant de « fainéants ». Elle avait appris qu’on cherchait à pourvoir un poste de cruche au Château. Elle avait toutes ses chances.

Les Engiletés pansaient leurs plaies nombreuses. Il y aurait un acte XIX. Mais en attendant, c’étaient les maîtres d’eschole et les professeurs qui s’apprêtaient à descendre dans la rue. Leur Chambellan, monsieur de BlanqueErre, leur promettait le supplice de la roue s’ils ne se soumettaient pas.

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