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Chroniques du règne de Manu 1er le Turpide.

Chronique du 3 au 8 août

« Je n’aime pas les piscines, je préfère la mer ». C’est par ces hautes et profondes paroles que notre Grand Communicateur reprit langue avec ses sujets. Cela faisait quatre jours qu’il attendait ce moment unique qui lui permettrait de remonter spectaculairement dans les carottages d’opinion . Rien n’avait été laissé au hasard. Les Services de son Ivresse des Altitudes étaient allés comme à l’accoutumée chercher des figurants – que l’on rémunèrerait en croquettes bien entendu – pour créer une ambiance de foule en liesse devant la Résidence d’Eté de notre Poudré Freluquet. Parmi ces gens, ramassés sur les plages, il s’était trouvé une petite famille dotée d’un insupportable bambin de six ans, lequel menait ses dépassés parents par le bout du nez. Il s’était pris – le cher ange ! – d’une passion pour la Reine d’Angleterre et pour notre Fascinant Pantin. Il rêvait de rencontrer sa Divine Hauteur dont il avait suivi – à cinq ans ! le prodigieux chérubin ! – toute la campagne d’accession au Trône. Visiter le Château figurait dans ses ambitions. On avait fait jouer aux figurants la comédie de la foule en liesse plusieurs jours d’affilée, afin que la température montât, et des gazetiers – nourris-aux-croquettes eux aussi – posèrent des questions oiseuses et sottes à ces vrais-faux Riens et Riennes. Le prodigieux bambin figura naturellement parmi les images choisies pour assurer la propagande dans les Lucarnes Magiques. Notre Fieffé Manipulateur comprit tout de suite tout l’intérêt qu’il pourrait retirer d’une rencontre avec ce Minou Drouet de la politique. Un gazetier fut spécialement dépêché pour retrouver sur les plages ce doux Zéphyr, afin qu’il fût bien présent avec ses dépassés géniteurs lorsque sa Sérénissime Turpitude ferait sa première sortie. Tout se passa à merveille ! Notre Grand Guérisseur des Ecrouelles apparut au grand portail de sa Résidence d’Eté, la barbe naissante, le hâle savamment entretenu et mis en valeur par un blanc pourpoint orné d’un petit crocodile, les lèvres figées sur un sourire carnassier et les yeux abyssalement vides. Sa Fantastique Sainteté se fit happer selon une chorégraphie bien huilée par ces quelques faux badauds, habilement entassés pour créer un effet de foule. Notre Machiavelique Monarc avisa le divin bambin et lui parla en ces termes : « Ça va jeune homme ? Tu vas bien ? Tu veux venir voir l’Élysée ? On va arranger ça ». Les Conseillers se mirent aussitôt à consulter compulsivement les carottages d’opinion pour vérifier si la courbe de la popularité de leur Révéré Maitre avait frémi ou grimpé en flèche. Un Anglais osa – l’imprudent – déplorer de ne pouvoir visiter la Résidence. Sa Très Offensée Grandeur lui répliqua vertement qu’il lui eût fallu venir en villégiature au mois de juillet. Que ce brave Nothing n’eût qu’une modeste semaine de congés payés dans l’année, de plus fixée arbitrairement au mois d’août, n’effleura pas la Pensée Complexe de notre Trépidant Nabab. A une vraie-fausse Rienne qui lui parlait baignade, sa Barboteuse Petitesse eut donc ces mots qui passeraient sans nul doute à la postérité : « je n’aime pas les piscines, je préfère la mer ». Les véritables Riens et Riennes, qui – de plus en plus nombreux tant les calamités économiques s’abattaient sur eux – ne pouvaient partir en congés au bord de la mer, et en étaient réduits à s’entasser dans des villes surchauffées par la canicule, sans suffisamment de piscines collectives où se rafraichir car certaines étaient fermées faute d’avoir été entretenues car il n’y avait plus d’argent magique que pour les Très-Riches– goutèrent comme il se doit la fraiche et pétillante saillie de notre Suffisant Jupitou.

Ce petit bain de foule était le bienvenu pour sa Pétocharde Petitesse. La veille, un terrible attentat avait été déjoué dans la Résidence d’Eté. On avait frôlé la tragédie. Un engin volant téléguidé à distance était venu survoler la piscine pendant que notre Barboteux Banquier y trempait son Auguste postérieur. Sa Médisante Altesse avait aussitôt pensé à ce qui venait d’arriver au Commodore Alcazar, un dirigeant d’une de ces lointaines républiques d’Amérique latine, dirigeant qu’il abhorrait et dont il ne se privait pas de dire le plus grand mal. Le Commodore avait en effet échappé à une tentative d’assassinat, lequel avait été perpétré par un engin comme celui qui survolait les jardins de la Résidence, rempli jusqu’à la gueule de poudre noire explosive. Les gazetiers-nourris-aux-croquettes, en rendant compte de cette détonante affaire, avaient, comme à l’accoutumée lorsqu’il s’agissait de décrier tout ce qui constituait l’héritage du prédécesseur du Commodore, le grand général Chavez, employé le conditionnel. Au fort de Brégançon, ce fut la panique générale. On fit donner le canon et l’engin s’abima dans la mer. On n’eût à déplorer que la perte de quelques assiettes, qu’un laquais portait à travers les jardins, pour le goûter de notre Caleçonné Monarc. La Reine-Qu-on-sort annonça qu’il faudrait à nouveau changer entièrement le service d’assiettes, car elle avait en profonde aversion tout ce qui était dépareillé. Le laquais – le malheureux- fut sévèrement tancé. C’est alors que sa Jupitérienne Hauteur s’avisa que cet engin volant ressemblait en tout points à celui qu’il avait offert en présent de Noêl à son bien-aimé Nervi le Sieur de GrosBras. Serait-ce possible, se murmura notre Barbouzeux Souverain, que mon cher GrosBras pensât encore à moi ?

Pour l’heure, il se disait que ce personnage décidément bien sulfureux mais ô combien indispensable à sa Paranoiaque Majesté avait trouvé à s’employer comme garde du corps auprès d’une comédienne du Théâtre de la Téléréalité.

L’été suivait son cours dans la StartupNation et c’était un été caniculaire, annonciateur de catastrophes climatiques à venir. Les hôpitaux croulaient sous le nombre de patients et le manque criant de médecins et d’infirmières. Mais la marquise de Buse, Grande Chambellane à la Santé, affirma d’un ton péremptoire : « je pense que la société commence à s’adapter ». Tout allait donc pour le mieux dans le meilleur des mondes.

Le Prince de la Britannique Nation s’en était venu sur le sol de la vieille République française pour honorer la mémoire de tous les Riens et les Nothings tombés lors de la mémorable bataille d’Amiens, au début du précédent siècle, lors de la Grande Guerre. Mais il se trouva bien seul. Ce genre d’hommage n’intéressait point notre Turpide Startupeur qui continua à barboter dans sa piscine. Quant à au Grand Premier Chambellan, il était allé se mettre au vert on ne sait où. Son Oublieuse Petitesse estimait qu’elle en avait assez fait avec les Anglais. Le vendredi précédent, notre Touristique Guide avait fait les honneurs de la Résidence d’Eté à la Prime Minister, lady May, accompagnée de son fort bien élevé époux. Un Conseiller – à moins que ce ne fût l’indispensable Marquise de Diaille, la grande prêtresse de la communication – avait enregistré la visite sur son smartruc et diffusé le tout sur les Réseaux Sociaux. Les Riens et les Riennes avaient donc pu bénéficier de ladite visite, sous la houlette de sa Diserte Altesse, en bras de chemise, suivi de la Reine-Qu-on-sort qui trottinait derrière, perchée comme à l’accoutumée sur des talons qui lui donnaient une démarche quelque peu vacillante. A l’opposé de la Reine Bernadette, épouse du Roi Chirac, laquelle ne se séparait jamais de son sac à main, la Reine-Qu-on-sort parut fort embarrassée avec le sien. Du Roi Chirac, il en fut d’ailleurs question lorsque notre Mesquin Potineur raconta à Lady May comment ce bon roi – si sympathique à bon nombre de ses sujets-citoyens – était apparu nu comme un ver, à une des fenêtres de la Résidence, alors qu’au delà des murailles, les paparazzi se battaient pour obtenir un cliché. Sa Médisante Petitesse éprouvait une vraie joie à narrer cette futile anecdote. Lady May prouva encore une fois la très grande présence d’esprit, rompue à toutes les situations, des natifs de la Grande Bretagne. Elle émit un son bref, qui tenait tout autant de la désapprobation que de la surprise. Décidément, ce petit frenchy banquier n’était pas sortable.

Un commentaire sur “Chroniques du règne de Manu 1er le Turpide.

  1. Il a pourtant fait construire une piscine en son palais de Brégançon !

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